[Mali] AfricTivistes invite la junte au respect des libertés fondamentales !
Le mercredi 10 avril, le président de la transition du Mali, Assimi Goïta, a décrété la suspension “jusqu’à nouvel ordre” des activités des partis et des associations à caractère politique sur l’étendue du territoire national.
Depuis lors, plusieurs personnalités, organisations et partis se sont levés pour dénoncer un acte “sans précédent” qui “viole” tous les textes constitutionnels et législatifs du pays tout en portant atteinte aux libertés démocratiques.
Les 80 partis et organisations de la « déclaration du 31 mars », qui rassemble la quasi-totalité des mouvements politiques du pays, dénoncent “des atteintes graves aux libertés démocratiques.” Au-delà, des vives réactions venant de personnalités maliennes de premier plan ont aussi été entendues notamment sur les réseaux sociaux.
Le jeudi 11 avril, c’est à travers un communiqué, que la Haute autorité de la communication (HAC) invite “tous les médias (radios, télés, journaux écrits et en ligne) à arrêter toute diffusion et publication des activités des partis politiques et des activités à caractère politique des associations.”
Ladite décision a donné suite à des appels à la “désobéissance civile” et de vives réactions d’organisations. La Maison de la Presse, dans un communiqué, rendu public le 11 avril, a rejeté purement et simplement les injonctions “sans fondement juridique de la HAC.” Elle a appelé la presse à “rester debout, unis et mobilisés pour la défense du droit du citoyen à l’information.”
Pour rappel, la chaîne de télévision Joliba TV News, a été suspendue le 3 novembre 2022, pour deux mois par la Haute Autorité de la communication (HAC) après la diffusion d’un éditorial critique du journaliste malien Mohamed Attaher Halidou sur la gestion de la transition politique par la junte au pouvoir.
AfricTivistes exprime ainsi sa profonde inquiétude devant cette regrettable décision qui foule les droits fondamentaux à la participation citoyenne, religieuse et politique, et juge malvenue la “raison d’ordre publique“ invoquée dans ce cas.
Solidaire aux nombreuses réactions des forces vives du Mali, AfricTivistes appelle les autorités de transition à reconsidérer la décision de suspendre les activités à caractère politique et à travailler à une feuille de route visant à achever le processus de transition en cours dans le respect des libertés fondamentales.
Nous estimons que cette suspension est de nature à entraver la mise en œuvre d’un processus de transition inclusive dans le pays. Elle constitue une violation flagrante de la Constitution, adoptée le 18 juin 2023 par les maliens sous l’actuelle transition. Cette charte fondamentale, en son article 17 stipule que “L’Etat reconnaît et garantit, (…) la liberté d’association, de réunion, de cortège et de manifestation.” Cette suspension foule également au pied, la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples précisément en ses articles 10 et 11.
Nous dénonçons également les censures et restrictions de la liberté de la presse, pilier essentiel de toute société démocratique. Elles enfreignent les articles 14 et 15 de cette même Constitution. Les censures, quelles qu’elles soient, violent la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH), la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) et la Déclaration des principes sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique qui a été élaborée conformément au paragraphe 1 de l’article 45 de la CADHP.
Rappelons que cette décision des autorités survient dans un contexte de crise sécuritaire où la junte au pouvoir est chahutée en raison de son manquement à l’engagement d’organiser la présidentielle depuis sa prise de pouvoir en 2020.
Au Mali, l’opposition, les journalistes, les activistes pro-démocratie,… se retrouvent confrontés à des mesures coercitives, allant des mises en cause judiciaires aux restrictions à la liberté de la presse, à l’exil en passant par la dissolution d’organisations. AfricTivistes, rappelle que la censure ne fera que dégrader la situation et exacerber les sentiments d’indignation et de révolte légitimes des populations.
Nous invitons en définitive les autorités maliennes à respecter les droits fondamentaux dont le droit d’association et de réunion et le droit inaliénable des citoyens maliens à être informé de manière libre et transparente.